Travelling One/USA
vidéo HD, 12’
Le poste frontière USA-Canada situé au centre de Detroit n’est pas des plus menaçants : on y accède depuis la ville canadienne de Windsor par un tunnel réservé aux voitures particulières, qui ressemble au couloir du métro parisien. À peine quelques minutes sous la Detroit River et l’on débouche sur huit guichets, huit gates for Heavens au pays du cinéma grand format. L’Amérique !
Quelques instants de patience et bien vite, la conversation d’usage : destination, motivation, durée et raison du séjour. Puis passage au bureau pour remplir la fiche verte d’entrée dans le territoire, votre visa. Mais quand les douaniers constatent que vous avez filmé votre arrivée, ils interviennent, alarmés : on ne filme pas le seuil des USA.
Travelling One/USA est issu d’une séquence d’images rescapées. Un road-movie ingénu, devenu projet de fiction cinématographique rétrospectivement, par son inaboutissement-même. Comment faire face, dans la vraie vie, à la caméra —à la batterie des caméras— qui accueille le voyageur, héros malgré lui ? La caméra vidéo de poche, dont Robert Kramer aurait pu rêver pour ses longues routes américaines, se risque, ingénue, à ouvrir le contrechamp. Avec sa naïveté en grand angle, elle brave l’ensemble des prises simultanées sur tous les axes en one shoot de sécurité —que jamais personne ne verra. Une fois saisie par la main de l’autorité, contrariée mais pas trop tatillonne ce jour-là, son ergonomie récalcitrante lui évite de peu l’effacement, et laisse la promesse d’un film où tout est vrai, fiction comprise. |